Tecnifibre a fêté ses 40 ans en 2019, une année particulièrement dense pour la marque française avec une nouvelle stratégie, une nouvelle identité visuelle et un ambassadeur Daniil Medvedev qui a crevé l’écran jusqu’à se hisser au 4ème rang mondial. Nicolas Preault, le PDG de Tecnifibre, a accordé un entretien à sportsmarketing.fr en marge des Nitto ATP Finals à Londres.
Bruno Cammalleri : votre égérie Daniil Medvedev est aujourd’hui 5ème joueur mondial. Il était bien loin de ce classement en 2016 quand il a rejoint la team Tecnifibre…
Nicolas Preault : notre première mission est de faire de la détection. Nous y passons énormément de temps au quotidien et nous investissons beaucoup dans le monde entier : le but est d’être au contact des coachs, des parents, et d’être présents sur les événements afin d’identifier les futurs talents. Bien sur le sport n’est pas une science exacte : on peut très bien avoir un jeune joueur de 10/14 ans avec un potentiel incroyable, qui a déjà des résultats de très haut niveau et qui ensuite s’effondre. Mais il y a des signes qui ne trompent pas !
Quand nous avons signé avec Daniil en 2016, il était 329ème joueur mondial au classement ATP. On a tout de suite perçu, de part son physique, son intelligence et son style de jeu, qu’il pouvait amener quelque chose de nouveau pour le tennis. Nous ne savions pas en 2016 s’il allait devenir un top player ou non. Cela s’est fait il y a deux ans, quand lui même s’est concentré à 100% sur sa vie de tennisman et de compétiteur, avec un objectif : celui de gagner tous les matchs. Si vous demandez à Daniil s’il veut devenir numéro 1 mondial, il vous répondra qu’il n’en sait rien. Ce qu’il veut c’est gagner le match du jour, puis celui du lendemain… Si vous m’aviez posé la question sur le potentiel de Daniil il y a un an je vous aurais répondu top 10. Je n’aurais jamais dit top 5. C’est toute la beauté du sport. Daniil fait un été incroyable avec sa finale de l’US Open contre Rafaël Nadal. Quand je suis arrivé chez Tecnifibre, Daniil était 25ème ou 26ème. J’ai passé une journée avec lui à Cannes, mais en dehors de la saison : une fois revenu de cette journée j’ai dis à nos équipes que si un jour il arrivait à performer, avec sa personnalité et son intelligence, alors quelque chose allait se passer rapidement. C’est mon job d’anticiper cet aspect stratégique et marketing.
Bruno Cammalleri : en 2019 Daniil Medvedev s’est révélé aux yeux du grand public. Ce fut aussi l’année des 40 ans de Tecnifibre. Comment vous projetez-vous dans le futur ?
Nicolas Preault : nous avons effectivement fêté nos 40 ans au mois d’avril et nous nous sommes projetés sur les 40 prochaines. C’est un message très important à mes yeux. En arrivant chez Tecnifibre j’ai rencontré le patron de Lacoste Thierry Guibert qui m’a expliqué pourquoi il avait racheté Tecnifibre et ce qu’il avait en tête. Suite à cet entretien, j’ai passé une journée extrêmement instructive et enrichissante avec le fondateur de Tecnifibre Thierry Maissant. Fort de ces échanges nous avons mis en place, avec les équipes Tecnifibre, trois grandes phases : une première qui s’est déroulée en 2018 où l’on a réfléchi sur ce qu’on voulait faire de cette marque à moyen et long terme. Nous avons fait valider ce projet par nos actionnaires, à savoir le groupe Lacoste.
En 2019 nous avons commencé à mettre en place ce projet : nouvelle identité de marque, synergies avec Lacoste et tout le travail que l’on fait au niveau du marketing sportif, à la fois sur les joueurs , les événements ou Les Petits Crocos. Troisième phase, en 2020/2021/2022, qui correspondra à la période d’activation du projet avec pour enjeu de transformer tout cela en business.
Bruno Cammalleri : comment le rachat de Tecnifibre par Lacoste oriente-t-il ce projet ?
Nicolas Preault : pour qu’un mariage fonctionne il faut qu’il y ait une forme d’équilibre. Et cela reste valable dans tous les domaines ! Dès mon arrivée à la tête de Tecnifibre, Thierry Guibert m’a demandé de réfléchir aux synergies entre Lacoste et Tecnifibre. Quelles étaient les forces en présence ? D’un coté Tecnifibre, 45 personnes, 25 millions d’euros. Et Lacoste, 10 000 personnes, 2 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Comment créer l’équilibre ?
Ce crocodile est une clé qui permet d’ouvrir toutes les portes au niveau mondial
On s’est vite aperçu que Lacoste et Tecnifibre sont deux marques complémentaires. Lacoste amène la puissance incroyable de sa marque. Ce crocodile est une clé qui permet d’ouvrir toutes les portes au niveau mondial. Lacoste apporte également sa puissance au niveau des moyens. Tecnifibre apporte à Lacoste son expertise dans le sport performance, en particulier dans le tennis. Daniil Medvedev en est un bon exemple. Sans nous il ne jouerait pas en Lacoste. Il joue avec nos produits, raquettes et cordages, depuis 2016. Sa tenue est passée en Lacoste au début de l’année 2019.
Bruno Cammalleri : Tecnifibre est silver partner de l’ATP. Comment se matérialise ce partenariat ?
Nicolas Preault : il s’agit d’un partenariat très stratégique pour nous. Tecnifibre est le cordeur officiel de l’ATP et nous sommes présents ici pour les Masters de Londres, tout comme la semaine dernière à Milan lors des Next Gen. En parallèle de tout cela, nous travaillons sur l’aspect sponsoring des différents tournois ATP. Au moment où l’on se parle nous avons trois piliers qui nous permettent d’être présents partout dans le monde : on devient partenaire du Miami Open à partir du printemps 2020, avec donc une présence sur les USA mais aussi sur l’Amérique Latine puisque le Miami Open gravite sur l’ensemble du continent. Grâce à Lacoste, nous nous sommes rapprochés du Masters 1000 de Shangaï et nous sommes aussi partenaire du tournoi de Monte-Carlo, qui est un autre Masters 1000. Soit autant de contacts avec les organisateurs de tournois, et la possibilité d’avoir des contrats spécifiques avec eux.
Nos cordeurs sont des artisans, ils sont capables de corder une raquette au millimètre près
La première chose que l’on exige quand on intervient comme sponsor c’est bien sur d’être présent comme cordeur mais également que notre stand de cordage soit bien visible. Nous avons un niveau d’exigence très élevé en la matière. L’image que nous avons d’un stand de cordage c’est celui d’un stand de Formule 1. Nous présentons quelque chose d’extrêmement clean. C’est du très haut niveau. Quand on corde Nadal, Federer, Djokovic ou Medvedev avant une finale, on n’a pas le droit à l’erreur. Nos cordeurs sont des artisans, ils sont capables de corder une raquette au millimètre près. C’est ça que l’on veut mettre en avant.
Les événements sont d’abord des vitrines qui permettent de mettre en avant notre savoir-faire. Les tournois sont aussi l’occasion d’avoir des hospitalités, des média days, de recevoir des clients importants et de travailler avec les acteurs du marché. Nous pouvons ainsi leur faire partager notre expérience.
Bruno Cammalleri : vous avez cité la Formule 1 tout à l’heure. Quels sont les autres sports qui vous inspirent ou que vous pratiquez ?
Nicolas Preault : j’ai cité la Formule 1 pour toute l’imagerie incroyable qu’il y a derrière ce sport. Quand on voit à quel point les garages sont devenus des endroits mythiques je trouve ça intéressant d’un point de vue marketing. En ce qui me concerne je suis un passionné de sport depuis toujours ! A l’origine je suis un skieur et un snowboardeur. Je me suis mis à courir à l’âge de 15 ans et je cours quasiment tous les jours. J’ai la chance d’habiter en Bretagne pendant le week-end et j’y pratique beaucoup de sports de glisse : surf, kite, paddle… tout ce qui permet d’être en contact avec la nature et qui permet d’avoir une pratique sportive.