Avec le dernier tournoi de qualification pour Tokyo qui a lieu à Charlety du 19 au 21 juin, puis dans la foulée (du 22 au 27 juin) une étape de Coupe du Monde, toujours à Charlety, le Tir à l’arc français se met en route vers Paris 2024. Rencontre avec Jean-Michel Cleroy, président de la Fédération Française de Tir à l’arc qui revient notamment sur l’organisation acquise par la France d’une étape de Coupe du Monde pour les 3 prochaines années.
Bruno Cammalleri : pourquoi avoir candidaté sur l’organisation de la manche européenne de la Coupe du Monde de Tir à l’arc ?
Jean Michel Cleroy : lorsque j’ai été élu président de la Fédération Française de Tir à l’arc en 2017, il me semblait naturel que la France reprenne une place plus importante dans les organisations de compétitions internationales, avec en toile de fond la préparation de nos athlètes pour Paris 2024. L’épreuves des Jeux est unique : tous les matchs se déroulent dans une arène et il n’y a pas d’autre épreuve tout au long de l’olympiade qui ressemble à celle-ci, sauf peut être l’épreuve de Coupe du Monde. C’est pour cela que nous avons postulé sur cette étape de Coupe du Monde, en voulant préparer au mieux nos athlètes pour 2024 puisque nous aurons trois garçons et trois filles.
Bruno Cammalleri : quels sont les autres objectifs qui ont motivé cette candidature ?
Jean Michel Cleroy : toujours avec Paris 2024 en ligne de mire, nous allons former des bénévoles qui vont nous accompagner pendant ces trois années. On parle beaucoup d’héritage des JO, et nous souhaitons garder avec nous ces personnes qui vont engranger de l’expérience pour la suite et pour nos championnats. L’idée est de constituer un pool de volontaires. Autre objectif clé pour nous, travailler sur l’acculturation au tir à l’arc : nous avons nos licenciés qui sont des passionnés et qui nous suivent, mais on peut voir le tir à l’arc à la TV sur les grandes chaînes uniquement lors des Jeux. Le contexte est particulier cette année, mais nous prévoyons pour les trois années à venir des opérations de promotion du tir à l’arc auprès du public dans les régions. Nous n’avons pas pu le faire cette année, on espère pouvoir l’an prochain. De plus, nous avons entamé des opérations auprès des scolaires (primaire et collège) en 2018/2019.
Bruno Cammalleri : à trois ans de Paris 2024, dans quel état d’esprit êtes-vous en tant que président de fédération sportive nationale ?
Jean Michel Cleroy : organiser les Jeux Olympiques et Paralympiques en France c’est une formidable opportunité. Toutes disciplines confondues, la France dispose d’un vrai savoir-faire en terme d’organisation de grands événements. Nous l’avons déjà prouvé. Il faut bien sur que les Français participent aux Jeux et qu’il y ait un élan populaire. C’est une fête extraordinaire pour les athlètes, mais il faut aller au-delà. On va accueillir le monde entier ! L’enjeu c’est aussi l’après 2024, en sachant qu’on ne peut pas tout attendre du COJO. Chaque fédération travaille dans le bon sens avec l’ensemble des parties prenantes et bien sur avec le monde économique et social. Il n’y a pas que le volet sportif. Mon rêve depuis que l’on a décroché l’organisation des JOP 2024, c’est de mettre davantage de sport à l’école, au-delà des 30 minutes. C’est un enjeu clé sur le long terme : inculquer une culture sportive qui soit plus naturelle à nos jeunes, peu importe la discipline. On n’y est pas tout à fait encore, mais ce serait bien de travailler sur cet objectif pour le bien être et l’épanouissement de chacun.
Bruno Cammalleri : coté tricolore, Lisa Barbelin et Jean Charles Valladont sont qualifiés pour les JO de Tokyo…
Jean Michel Cleroy : Lisa a vraiment démontré, notamment sur les trois compétitions internationales qui se sont déroulées cette année, sa combativité et sa volonté de gagner. Elle avait de très hauts objectifs et elle s’est donné les moyens d’y arriver. A ce niveau-là, tout le monde a la technique et le matériel. C’est au mental que ça se joue dans notre sport. Après une année difficile, Jean-Charles s’est remis en question et a su très bien revenir. Il a déjà été médaillé aux Jeux Olympiques, il sait comment on y arrive ! Lisa et Jean-Charles sont nos deux porte-drapeaux, fille et garçon. Pour la première fois à Tokyo, nous aurons une épreuve mixte aux JO et nous y participerons. Concernant le tournoi de qualification pour Tokyo de Charlety (du 19 au 21 juin), sur les équipes, l’objectif est d’être qualifié pour les garçons, et espérons-le aussi pour les filles car ce serait une belle surprise. On va voir du très haut niveau sur ce TQO car beaucoup de nations n’ont pas eu leur quota par équipe lors des Mondiaux il y a deux ans et elles viennent à Paris ce week-end pour les obtenir. Ce sera difficile et il ne faudra pas se manquer. Il faudra être au top tout de suite et on verra ensuite comment s’ouvrent les tableaux.
Bruno Cammalleri : avec quels partenaires travaillez-vous pour l’étape de Coupe du Monde ?
Jean Michel Cleroy : Charléty fait partie de notre projet depuis le début, le TQO s’est ensuite ajouté un peu au dernier moment. On cherche toujours des lieux emblématiques pour les phases finales. Nous avions pensé à la cour du château de Vincennes, mais on ne peut pas y aller cette année pour des raisons sanitaires. Nous irons en 2022 ! Pour Charléty, nous avons le soutien à 200 % de la Ville de Paris depuis le début. Nous sommes aussi soutenus par le ministère chargé des Sports et le Conseil régional d’Ile de France. En 2023 nous organiserons l’étape de Coupe du Monde sur l’Esplanade des Invalides qui accueillera l’épreuve olympique en 2024.
Bruno Cammalleri : à quel point le tir à l’arc français est-il impacté par la crise sanitaire ?
Jean Michel Cleroy : nous étions prêts sur le côté sportif. Nous nous sommes bien adaptés et nous avons très protocoles très stricts avec la fédération internationale au niveau de nos compétitions avec une bulle sanitaire, car on doit protéger les athlètes à un mois des JO de Tokyo. Il faut savoir que si un athlète sort de cette bulle il est exclu, et la même règle sera appliquée à Tokyo. Ces règles engendrent un surcoût qui n’était pas prévu dans notre organisation. Dans nos clubs, c’est aussi compliqué même si nous avons la chance d’être un sport à la fois intérieur et extérieur. Dès que la météo le permettait, nous avons eu depuis mars certains clubs qui ont pu reprendre. Mais sans avoir de compétition, sauf les challenges virtuels que nous avons mis en place avec les clubs et les comités départementaux. On a perdu cette année 22 % de licenciés par rapport à l’an dernier. D’autres sports sont néanmoins plus impactés que nous. Nous avons aussi maintenu les championnats de France. Se pose aussi la question des bénévoles, car certains clubs veulent organiser des compétitions mais manquent de volontaires. Tout l’enjeu pour nous c’est septembre, en espérant que la confiance revienne sinon nous serons en grande difficulté.