La marque qui se définit comme « la start-up française des sports de raquette » ne cesse de grandir. En effet, Tecnifibre a doublé son chiffre d’affaires depuis son rachat par Lacoste. Une dynamique qui n’est pas prête de s’arrêter, d’autant plus qu’Iga Świątek, numéro 1 mondiale, vient de prolonger son aventure avec Tecnifibre pour 4 années supplémentaires. Sportsmarketing.fr a rencontré Nicolas Preault, CEO de Tecnifibre.
Bruno Cammalleri : Pouvez-vous revenir sur la prolongation pour 4 années supplémentaires d’Iga Świątek avec Tecnifibre ?
Nicolas Preault : Cette prolongation est hautement stratégique pour la marque Tecnifibre. Iga, au même titre que Daniil, nous les considérons pas simplement comme des top players mais comme des ambassadeurs. Iga Świątek est une ambassadrice parfaite pour Tecnifibre, à la fois par rapport à son niveau de jeu mais aussi par rapport aux valeurs qu’elle porte. Comme Daniil, c’est quelqu’un qui s’exprime, qui prend des positions et qui le fait toujours avec humilité. Ce sont des éléments essentiels pour nous. Resigner 4 ans avec Iga c’est une belle aventure qui continue. Cela s’est réalisé de façon très naturelle : Iga avait tout de suite fixé le cadre avec ses agents pour dire qu’elle était totalement satisfaite des produits Tecnifibre et qu’elle ne voulait surtout pas en changer.
Il faut également ajouter tout l’accompagnement des équipes Tecnifibre, à la fois sur les produits mais aussi sur la façon dont on peut activer notre partenariat : je pense par exemple à ce que nous avions fait l’an passé pour sa victoire à Roland Garros où nous avions changé notre nom sur les réseaux sociaux en « Swiateknifibre ». Iga voit bien toute l’énergie qu’il y a derrière elle chez Tecnifibre. Nous l’avons faite venir au siège de Tecnifibre juste avant Roland Garros et elle a séduit l’ensemble de nos salariés. C’est important de faire vivre ce type d’expériences aux équipes Tecnifibre en interne.
Bruno Cammalleri : Iga Świątek est sous contrat avec Tecnifibre depuis 2021. Comment a été initié ce contrat au tout début ?
Nicolas Preault : Ce contrat est issu d’un fonctionnement assez classique chez nous. Iga jouait depuis très jeune avec nos raquettes. Elle est ensuite partie chez une autre marque, elle était un peu en perte de vitesse et avait la volonté de changer de matériel. Elle nous a approché par l’intermédiaire de son coach. Quand un nouvel athlète souhaite nous rejoindre, on se met au travail en interne et on doit valider la partie matériel. Nous mettons à disposition notre savoir-faire, notamment via notre Tecnilab qui est un outil permettant de transférer des sensations de joueurs en datas scientifiques afin d’aider la joueuse ou le joueur à effectuer les meilleurs choix possibles. Le joueur ou la joueuse est vraiment au centre de notre dispositif et nous investissons beaucoup de temps pour connaître le joueur ou la joueuse en question. Identifier ses besoins d’abord et développer les bons produits ensuite. Une fois le matériel validé, on s’est assis autour d’une table pour travailler le projet marketing. Puis c’est allé très vite avec son agent pour la négociation du contrat. Tout s’est passé de façon fluide avec Iga !
Bruno Cammalleri : Où en est votre collaboration avec Daniil Medvedev ?
Nicolas Preault : C’est vraiment une histoire de cœur avec Daniil qui est très proche de la marque. Daniil était 329ème à l’ATP quand il nous rejoint. Les projecteurs n’étaient alors pas braqués sur lui comme c’est le cas aujourd’hui. Dès le départ, lorsqu’il a signé chez nous on lui a mis à disposition une bourse de 50 000 dollars à la suite d’un challenge Tecnifibre qu’il a remporté. Cela lui a permis de financer sa première saison. Daniil est quelqu’un de très intelligent qui a une bonne mémoire et je pense qu’il a toujours ça en tête. On l’a fait participer à différents camps d’entraînement avec d’autres jeunes joueurs où ils ont pu faire du partage d’expérience. On accompagne donc nos joueurs jusqu’au plus haut niveau. Une fois qu’ils l’atteignent, on entre plutôt dans une forme de collaboration où l’on va construire un partenariat avec de véritables ambassadeurs. On travaille sur les produits, la visibilité, la transmission pour les jeunes et le partage avec nos équipes en interne.
En ce qui me concerne je suis très proche de Daniil et on communique beaucoup ensemble. Il a fait un début de saison 2023 incroyable ! C’est un immense champion qui a su se relancer après une saison 2022 plus délicate. Il s’est relancé en apportant des changements, notamment dans son matériel. Un joueur de tennis a généralement une relation très forte avec sa raquette de tennis et son cordage. De notre côté nous étions en phase de finalisation d’un tout nouveau cordage qui s’appelle le Razor code. Nous l’avons proposé à Daniil fin 2022. Daniil a cette capacité à prendre des risques et faire des petits changements pour aller chercher une performance encore plus élevée. Il a utilisé ce cordage là en 2023 à partir du tournoi de Rotterdam. Il a enchainé 6 finales depuis et il est passé de la 12ème place du classement ATP à la 2ème.
Bruno Cammalleri : Quels sont les autres noms de la team Tecnifibre qu’il faut avoir en tête ?
Nicolas Preault : Au-delà des plus visibles que sont la numéro une mondiale Iga Świątek et le numéro deux mondial Daniil Medvedev, nous sommes prêts pour demain. En U18 nous avons deux très jeunes talents qui sont Alexander Blockx, qui est un belge âgé de 17 ans numéro 1 mondial dans sa catégorie d’âge, et Rodrigo Pacheco Mendez, mexicain, numéro 3 mondial. Blockx a gagné en début d’année l’Open d’Australie en catégorie junior. Ces deux jeunes talents devraient explosés au niveau ATP dans les mois à venir.
Pour après-demain, nous continuons d’investir pour le futur et nous avons toujours notre programme Les Petits Crocos avec Lacoste. Nous avons certainement le meilleur team mondial de U14 avec 10 joueurs triés sur le volet et 8 nationalités différentes. Nous allons accompagner ces très jeunes joueurs jusqu’au plus haut niveau. D’ailleurs à titre d’exemple Rodrigo Pacheco Mendez est issu des Petits Crocos. Nous bénéficions aussi d’une bonne visibilité grâce à des héros locaux comme Tallon Griekspoor qui vient de remporter chez lui le tournoi ATP 250 de Hertogenbosch (Pays-Bas).
Bruno Cammalleri : Et côté français ?
Nicolas Preault : Corentin Moutet, qui voulait relancer son niveau de performance, vient de nous rejoindre. Il est blessé au poignet et il a décidé de jouer avec une raquette Tecnifibre très innovante qui s’appelle la TF-X1. C’est une raquette très puissante, mais elle permet aussi de limiter les vibrations grâce au X-Damp qui est une innovation propriétaire à Tecnifibre qui réduit les vibrations nocives de 36% pour moins de fatigue et plus de confort. Nous avons aussi avec nous Arthur Rinderknech, Grégoire Barrère et Constant Lestienne. Nous avons beaucoup de joueurs français qui nous permettent d’être très présent sur notre marché domestique.
Bruno Cammalleri : il y a deux ans vous nous annonciez que Lacoste confiait à Tecnifibre sa distribution mondiale spécialisée tennis & golf à partir de la collection printemps/été 2022. Où en êtes-vous dans vos synergies avec Lacoste ?
Nicolas Preault : Nous avons de très fortes progressions que ce soit sur le tennis ou le golf, et ce sont des progressions à deux chiffres. Nous continuons de travailler avec les équipes Lacoste sur des synergies de produits, d’athlètes et d’events. Nous sommes d’ailleurs grâce à Lacoste partenaire de l’ATP Master 1000 de Miami. Le sport fait parti de l’ADN Lacoste. C’est la raison pour laquelle le groupe Lacoste a acquis Tecnifibre fin 2017. Aujourd’hui cela fait encore plus sens qu’hier que Tecnifibre fasse parti du dispositif et travaille sur le côté expertise sport-performance avec les équipes Lacoste.
Bruno Cammalleri : Tecnifibre a célébré ses 40 ans en 2019. Que préparez-vous pour vos 45 ans en 2024 ?
Nicolas Preault : Nous avons commencé à travailler sur le sujet car nous aimons bien célébrer ! Il se pourrait bien qu’il y ait une fête dans le courant de l’année 2024 pour célébrer nos 45 ans mais aussi tout ce que l’on a accompli. Nous avons par exemple multiplié par deux notre chiffre d’affaires sur les cinq dernières années, ce qui demeure considérable. Nous sommes réellement dans le mode start-up ! On se définit souvent comme la start-up française des sports de raquette. Si notre chiffre d’affaires progresse, on progresse également en interne en intégrant continuellement de nouveaux collaborateurs, quasiment tous les mois, avec des personnes qui ont des profils très élevés. En 2024, nous prendrons le temps de célébrer tout ça. Nous nous projetterons aussi sur les cinq prochaines années.
Bruno Cammalleri : S’agissant de votre progression ces dernières années, quels sont les chiffres à retenir ?
Nicolas Preault : Au moment où nous avons été rachetés par Lacoste nous étions à peu près à 22 millions d’euros de chiffre d’affaires. En 2022, nous avons terminé l’année à 45,7 millions de chiffre d’affaires. Le chiffre d’affaires a donc été multiplié par deux. Et nous avons fait + 60% par rapport à 2021. L’année 2022 a été très forte. Cette année, malgré le fait que le marché soit plus compliqué avec beaucoup de stocks et une consommation moindre, nous poursuivons notre progression puisque nous sommes à + 50% sur les cinq premiers mois de 2023 par rapport à une année exceptionnelle que fut 2022. Notre objectif est de multiplier par deux le chiffre d’affaires sur les trois prochaines années. Nous faisons plus de 80% de notre chiffre d’affaires à l’extérieur du marché français. Nous sommes vraiment une marque globale présente dans 80 pays et notre progression est à deux chiffres partout dans le monde.
Bruno Cammalleri : Et sur la partie interne ?
Nicolas Preault : Sur la partie interne, nous sommes une petite équipe mais très compacte avec une organisation en mode opérationnel et 8 nationalités différentes. Nos collaborateurs partagent les mêmes valeurs que nous qui tournent autour des valeurs de compétiteur pour toujours aller chercher le meilleur, de le faire avec beaucoup d’humilité et de détermination. Chaque sujet est piloté par un leader. Ce leader n’est pas forcément celui qui a le plus niveau hiérarchique mais c’est celui qui possède le plus haut niveau de compétences. 20% de nos équipes au niveau mondial ont commencé comme stagiaire chez nous. 55% de nos équipes ont déjà été promu au moins une fois dans notre organisation. Nous faisons vraiment confiance aux jeunes. Je cite volontiers l’exemple de Matthieu Bauduin qui est notre directeur marketing mondial : c’est un très bon joueur de tennis, il a fait HEC et a travaillé chez McKinsey. Il a seulement 27 ans et il nous a rejoint pour travailler sur des sujets stratégiques, notamment la refonte de notre plateforme de marque.